Le dernier repas de Jésus

Le dernier repas de Jésus

Le dernier repas de Jésus

« Vous mangerez en toute hâte, c’est une pâque pour Yahvé » Ex 12,11

« Prenez, mangez, ceci est mon corps » Mt 26,26

Ces paroles qui précèdent la Pâque juive (la sortie d’Egypte) et la Pâque chrétienne (la mort et la résurrection de Jésus), font référence à un repas et à un départ.

Et nous chrétiens, en ce temps proche de Pâques, sommes-nous privés de ce dernier repas, comme nous sommes privés d’eucharistie tous ensemble depuis la mi-Carême ?

Les Hébreux, en toute hâte, ont mangé l’agneau pascal chacun dans sa maison, en famille, et ont emporté le pain sans levain qu’ils avaient préparé pour pouvoir se nourrir durant sept jours  de fuite.

Jésus, lui, a « ardemment désiré manger cette pâque avec vous (ses disciples) avant de souffrir » Lc 22,15. Au cours de ce dernier repas, « prenant le pain, il rendit grâces, le rompit et le leur donna… Il fit de même pour la coupe après le repas » Lc 22,19-20. Lorsque Jésus apparaîtra, ressuscité, après cette période si sombre de sa Passion, ses disciples le reconnaîtront à la fraction du pain et ils reproduiront ses gestes comme il l’avait demandé : « Faites cela en mémoire de moi » Lc 22,19. Et ainsi naîtra l’Eglise avec son message d’amour pour le monde.

Les Hébreux, une fois libérés de l’esclavage d’Egypte, auront un désert à traverser durant 40 ans, nourris par la manne, avant d’atteindre la terre promise.

Le Jeudi Saint, Jésus a lavé les pieds de ses apôtres et leur a dit de faire de même entre eux. Le service des frères, au nom du Christ, nous n’en sommes pas privés. Nous déployons toute notre imagination pour savoir comment aider celles et ceux qui en ont le plus besoin. Et sans aller loin, les plus proches de nous, ceux qui sont confinés avec nous, nous nous demandons comment leur venir en aide de la meilleure façon.

En étant privés d’eucharistie, et non pas de communion au sens large, parce que les élans spirituels et fraternels sont nombreux, nous rejoignons celles et ceux qui en sont privés pour d’autres raisons. Par exemple dans les endroits les plus reculés d’Amazonie, comme l’a révélé le dernier synode. Ou bien les personnes divorcées remariées ou celles qui ne se sentent pas en règle avec l’Eglise.  Mais qui est complètement en règle ? Et puis il y a tous ceux qui s’éloignent de la fréquentation de la messe. N’est-ce pas une façon de les rejoindre, par un jeûne qui invite au partage ?

Nous vivrons donc Pâques comme nous vivons ces derniers dimanches, sans rassemblement et sans communion au corps et au sang du Christ qui nous sont si chers. Nous continuons à nous nourrir de la Parole de Dieu et à suivre, si possible, depuis un écran ou avec sa radio, une eucharistie célébrée par un évêque ou un prêtre, sans assemblée.

Pâques va bel et bien exister cette année, avec toute sa signification : son sens de départ, de libération. Quelle mer avons-nous à traverser pour être libérés d’un monde oppressant à cause de ses inégalités, de la surconsommation, de la pollution et des épidémies qu’il génère ? Sommes-nous prêts à traverser un désert pour gagner le monde plus juste qui nous est promis ? Désert qui veut dire sobriété et nouvelle organisation où on se souvient des commandements : « Tu n’auras pas d’autres dieux devant moi… » Ex 20,3

Sommes-nous prêts à être nous-mêmes le Corps du Christ, nourriture pour un monde qui a faim d’amour ? A être des témoins de celui qui nous dit : « Je suis le Pain de vie. Qui vient à moi n’aura jamais faim » Jn 6,35 ?

Continuons à être solidaires d’une humanité malade, par nos confinements et nos prières, et à nous réjouir du prochain rassemblement où nous pourrons dire ensemble : « Heureux les invités au repas du Seigneur ».

 Bonne semaine sainte,

J-Christophe Cabanis